jeudi 8 octobre 2015

Splendeurs et Misères: l'exposition polissonne du musée d'Orsay

 
Portrait de mademoiselle de Lancey, 1876, Carolus-Duran

« Splendeurs et misères. Images de la prostitution, 1850-1910 ». Du 22 septembre 2015 au 17 janvier 2016, le musée d'Orsay dévoile les secrets les moins chastes de la belle époque.

Quand la capitale de l'amour fait commerce...De l'amour. Ainsi aurait se nommer Splendeurs et misères. Audacieuse, pour ne pas dire culottée, c'est une exposition surprenante que propose le musée d'Orsay. Loin des sentiers battus, l'établissement offre un autre regard sur la belle époque : celui des cocottes et des filles de joie. Munch, Toulouse-Lautrec et bien d'autres encore sont à l'honneur à travers un parcours fascinant, dévoilant les secrets des alcôves parisiennes.

Loin d'être directe, la prostitution, thème centrale, n’apparaît dans un premier temps que de manière très subtile. Loin de faire rougir, les murs de la première pièce de l'exposition se composent de simples portraits de femmes. Entre les lithographies et autres esquisses, quelques toiles se démarquent. Parmi elles, Sur le boulevard (Une Parisienne) de Valtat, qui laisse songeur face au modèle principale : Une femme dans un espace publique, soulevant nonchalamment le bas de sa robe. Parfaite introduction à l'exposition, elle rappelle cette phrase vue sur un des murs du musée : « On ne sait plus aujourd'hui si ce sont les honnêtes femmes qui s'habillent comme des filles ou si ce sont les filles qui s'habillent comme des honnêtes femmes », fille étant un doux euphémisme pour prostituée. 

L'exposition jouant justement sur cette ambiguïté, très vite, les figures féminines laissent place aux scènes de nuit, moments de sociabilité et autres rendez-vous mondains. A coté des toiles, des noms tels que Degas ou Manet, qui ont immortalisé des scènes moins anodines qu'elles n'y paraissent. Devant Les coulisses de l'Opéra (Jean Béraud), une visiteuses s'exclame « C'est marrant de dire que ça, c'était indécent ». Ça, c'est le thème du tableau, ou cette trop grande proximité entre les ballerines et leurs admirateurs. A ce stade de l'exposition, jeunes nymphes et femmes fatales côtoient désormais gentilshomme et hommes moins bons. Des fragments de peau se dévoilent, la sensualité apparaît tandis que les mains se perdent.
Les coulisses de l'opéra, 1889, Jean Béraud
Les pièces défilent, les vêtements disparaissent. Le public, contemplatif dans les premières salles, s'anime soudainement. Au milieux des peintures, sculptures, photos et vidéos, on découvre un paris oublié, des mœurs qui se voulaient cachées. La nudité, quand elle apparaît enfin, n'est pas trivial. Dans un premier temps du moins. Car très vite, se présente cette salle interdite au moins de dix-huit ans et qui cache sous d'épais rideaux de velours, les positions les plus incongrus. 

Rolla, 1878, Henri Gervex
La prostitution, qui jusque lors n'était que suggérée, est désormais bien présente. Elle prend la forme de cartes aux noms évocateurs, de traités aux thèmes osés et même, de meubles les plus singuliers, en témoigne la fameuse « Chaise de Volupté » d'Edouard VII qui ne servait probablement pas à s'asseoir. Elle s'affiche sur ce qu'elle a de plus ludique, originale, glorieuse...sordide également. La misère des splendeurs se montre. Ce sont des toiles sombrent et dérangeantes, c'est le moulage en cire d'un visage, c'est une allégorie du vice...dans toute sa splendeur.
Loin de donner une image romantique du commerce de la chaire, l'exposition présente sans jugement et sous toutes ses formes, un phénomène aussi scandaleux que fascinant.